
LA RUBRIQUE DE FRED
DE LA TERRE AUX IDÉES
IL ÉTAIT UNE FOIS ...
MAIS PAS comme VOUS CROYEZ

Mon histoire commence dans les vignes du Médoc, dans le ventre de ma mère.
Elle travaillait à la tâche, au rang, sans horaires.
Une femme de la terre, de celles qui ne cèdent rien.
À trois ans, je guidais déjà les touristes dans les chais.
Fier. Curieux. Né dans le vin, comme d’autres naissent dans la mer.
À cinq, je l’aidais dans les travaux.
À huit, je pliais les sarments.
À dix, je conduisais le tracteur. Pas pour le jeu. Pour le travail.

À quatorze ans, je fais ma première vinification avec mon père et Marc Pagès.
À seize, je vinifie déjà plus de 4 000 hectolitres.
À dix-huit, je suis stagiaire chez Château Lafite Rothschild.
À vingt, direction la Champagne.
Puis viennent les études : école de commerce, œnologie, ENITA…
avant un détour par l’école des officiers de l’armée de l’air.
Un parcours à cheval entre grands vins, discipline, et terrain.


À vingt-quatre ans, je fonde Château SIPIAN avec mes parents.
Notre domaine viticole familial voit le jour, bâti à la main, mètre carré par mètre carré.
1 600 m² de bâtiments, levés par conviction plus que par confort.
Du ciment dans les mains, une vision dans la tête.
Très vite, je crois au commerce direct du vin, à la force du lien humain.
Je construis une clientèle fidèle en France, puis en Belgique, en Hollande, en Allemagne, au Japon…
Des bouteilles que j’apporte moi-même.
Des histoires qui commencent à la vigne, et se prolongent à table.


À trente-deux ans, avec Valérie, mon épouse, et Carles Raboz, un ami belge,
nous rachetons le Château Labatut à Cadillac.
J’y découvre la vinification des blancs secs, des rosés et des liquoreux,
sous l’œil bienveillant de Pierre-Jean Sanchez, homme de science et de cœur.
Avec Carles, ces vins trouvent leur place sur les plus belles tables de Belgique.
Le vin devient ambassadeur d’un savoir-faire à taille humaine.


En 2013, nous agrandissons SIPIAN de 25 hectares.
Je plante du sémillon, du malbec, du carmenère — ces cépages oubliés du Bordelais que j’ai voulu faire renaître.
Une viticulture engagée, pensée pour l’avenir.
Dès 2008, je quitte les Crus Bourgeois.
Trop de lenteur, pas assez d’audace.
Je voulais défendre une vision : celle d’un Médoc libre,
capable d’évoluer avec son temps.
Aujourd’hui, je crois que les faits m’ont donné raison.

En 2019, sur les conseils de Nicolas Vivas, ami précieux, nous vinifions un blanc sec comme rarement on ose en produire.
En 2021, il est sacré 3ᵉ meilleur vin du monde.
Un sommet, oui.
Mais SIPIAN regarde toujours devant.
Un vin n’est jamais un aboutissement. Il est un tremplin vers ce qui vient.

- des cépages résistants,
- une viticulture durable,
- une mécanisation raisonnée,
- une production hors appellation quand elle limite la créativité.
En 2025, nous sortons volontairement de l’AOC.
Pas par provocation, par cohérence.
Ma demande de création de l’appellation Médoc Blanc remonte à 1998.
On m’a pris pour un fou.
Elle verra peut-être le jour en 2026.
Trente ans plus tard.
AUJOURD'HUI, NOUS PRÉPARONS LA VITICULTURE DE DEMAIN

Je suis un vigneron épicurien, amoureux des produits vrais.
Je parle vin, je le vis, je le vends, je le partage.
Mes clients sont devenus mes amis.
Mes amis, souvent, mes clients.
J’espère vivre encore quarante ans à ce rythme.
Je reste Fred, le fils de tâcheron.
Celui qui aime le petit verdot, qui croit au retour du malbec, qui valorise les blancs secs du Médoc, et ne renonce jamais à un liquoreux bien fait.
Celui qui croit encore à la noblesse du commerce du vin, à la sincérité du travail, et à l’élégance d’un vin bien élevé

Celui qui parle sans détour,
et qui, sans le chercher, a transmis le virus.
Quentin, mon fils, est l’artiste de la famille.
Il a l’œil, le geste, l’instinct.
Il a imaginé chaque étiquette.
Il crée les collections.
Il apporte une vision neuve du vin plus libre, plus stylée, plus exigeante.
Il nous oblige à repenser notre métier. Et peut-être à le réinventer.